C'est quoi l'abolitionnisme ?




L'ABOLITIONNISME est un mouvement apolitique et féministe qui propose de lutter contre le phénomène prostitutionnel de la manière suivante:

- Accompagner, être aux côtés des personnes prostituées

- Leur proposer une alternative à la prostitution

- Responsabiliser voire pénaliser les clients-prostituteurs

- Réprimer réellement les proxénètes

- Mettre en place des mesures de prévention et d'éducation

lundi 14 février 2011

La pornographie à visage découvert

Je copie ici des extraits d'un texte d'Andréa Dworkin, la féministe qui a le mieux, à mes yeux, parlé de la pornographie. De la prostitution aussi, j'y reviendrai dans un autre billet.

"La pornographie et le désespoir" est un texte poignant et sans détours inutiles comme tout ce que son auteure, peu traduite en France, a écrit. Je vous invite à le lire dans son intégralité tant on a l'impression qu'elle est allée chercher les mots enfouis dans notre propre coeur.

Je nuancerais toutefois son propos par le constat personnel qu'il y a aussi des hommes qui ont su mettre en perspective l'éducation misogyne qu'ils ont reçue et qui luttent au jour le jour contre la pornographie et la prostitution aux côtés des femmes, des féministes. Je suppose que le mâle dont elle parle fait référence au groupe sociologique des hommes, pas aux individus, certes rares, qui peuvent s'être affranchi de leur conditionnement misogyne.

La pornographie est en soi abjecte. Ce serait mentir que de la caractériser autrement et le fléau des rationalisations et des sophismes mâles ne peut ni changer ni cacher ce simple fait. Georges Bataille, un philosophe de la pornographie (qu’il appelle "érotisme"), l’exprime très clairement : "Dans son essence, le domaine de l’érotisme est le domaine de la violence, de la violation ."

[...]

Aucune d’entre nous n’aurait pu imaginer ou croire possibles ces simples faits quotidiens que nous avons maintenant appris à connaître : la rapacité du désir de domination des mâles, la méchanceté de la suprématie mâle et le virulent mépris pour les femmes qui est le fondement même de la culture dans laquelle nous vivons. Le mouvement de libération des femmes nous a toutes obligées à regarder ces faits bien en face et pourtant, aussi courageuses et éclairées que nous soyons et aussi loin que nous soyons prêtes à aller (ou forcées d’aller), dans une vision de la réalité qui exclurait le romantisme et l’illusion, nous restons encore atterrées devant la haine des mâles pour notre sexe, sa mordibité, sa compulsivité, son obsessivité, son autocélébration dans chaque détail de la vie et de la culture. Nous pensons avoir enfin compris cette haine une fois pour toutes,l’avoir vue dans toute sa spectaculaire cruauté, en avoir compris tous les secrets, nous y être habituées ou l’avoir dépassée ou encore nous être organisées contre elle de manière à nous protéger au moins de ses pires excès. Nous pensons savoir tout ce qu’il y a à savoir sur ce que les hommes font aux femmes, même s’il nous est impossible d’imaginer pourquoi, quand tout à coup quelque chose se produit qui nous affole, nous fait perdre la tête, de sorte que nous nous retrouvons à nouveau emprisonnées comme des animaux en cage dans la réalité paralysante du contrôle mâle, de la vengeance mâle contre on ne sait quoi, de la haine mâle pour notre existence même.

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On peut tout savoir et pourtant être incapable d’accepter le fait que la sexualité et le meurtre soient à ce point amalgamés dans la conscience mâle, que la première soit impossible et impensable sans la possibilité imminente de l’autre. On peut tout savoir et pourtant, au fond de soi, refuser encore d’accepter que l’anéantissement des femmes soit pour les hommes la source de leur pensée et de leur identification.

[...]

L’aspect le plus terrible de la pornographie, c’est qu’elle révèle la vérité sur les mâles, et son aspect le plus pernicieux, c’est qu’elle impose cette vérité mâle comme si c’était la vérité universelle. Ces descriptions de femmes enchaînées que l’on torture sont censées représenter nos aspirations érotiques les plus profondes. Et quelques-unes d’entre nous le croient, n’est-ce pas ? L’aspect le plus important de la pornographie, c’est que les valeurs qui y sont charriées sont les valeurs partagées par tous les hommes. C’est là un fait capital que la droite comme la gauche mâles, de manières qui sont différentes mais qui se renforcent mutuellement, veulent dissimuler aux femmes. La droite mâle veut cacher la pornographie, la gauche veut cacher sa signification.

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La pornographie n’est pas une forme d’expression isolée et distincte du reste de la vie ; c’est une forme d’expression toujours parfaitement harmonisée à la culture au sein de laquelle elle s’épanouit. Et cela reste vrai, que la pornographie soit légale ou illégale. Dans un cas comme dans l’autre, la pornographie permet de perpétuer la suprématie mâle et les crimes de violence envers les femmes car elle conditionne, entraîne, éduque et incite les hommes à mépriser les femmes, à les utiliser et à leur faire mal. La pornographie existe parce que les hommes méprisent les femmes, et les hommes méprisent les femmes en partie parce que la pornographie existe.

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Quant à moi, la pornographie me détruit comme jamais la vie n’a pu le faire, du moins jusqu’à maintenant. Quelles que soient les luttes et les difficultés que j’aie connues dans ma vie, j’ai toujours eu le désir de trouver un moyen de continuer même si je ne savais pas comment, pour vivre un jour de plus, apprendre une chose de plus, faire encore une promenade, lire encore un livre, écrire un autre paragraphe, voir encore un ami, aimer encore une fois. Quand je lis ou que je vois de la pornographie, je voudrais que tout s’arrête.

[...]

Parfois, c’est un détail qui me rend folle. Je regarde, par exemple, une série de photographies : une femme se tranche les seins au couteau, se barbouille le corps de son propre sang, s’enfonce une épée dans le vagin. Et elle sourit. C’est ce sourire qui me rend folle.

[...]

Personne ne veut arrêter cela, nos chers intellectuels le défendent, d’élégants avocats progressistes plaident en sa faveur et des hommes de tous les milieux ne peuvent et ne veulent vivre sans cela. Et la vie, qui est tout pour moi, perd tout son sens car ces célébrations de la cruauté détruisent ma capacité même de sentir, d’aimer et d’espérer. Je hais les pornographes par-dessus tout parce qu’ils me privent de l’espoir.

3 commentaires:

  1. J'ai envie de te communiquer ce que j'ai écrit ici http://sarkofrance.wordpress.com/2011/02/14/sarkozy-beaucoup-plus-dangereux-que-tony-meilhon/#comments
    en réaction à un avocat qui prétend que Sarko est plus dangereux que le type qui a assassiné la pauvre Laetitia (ou, devrait-on dire : qui a assassiné la joie car c'est le sens de son nom). Peut-être veut-il dire que Sarko par sa politique fabrique des Meilhon à la pelle mais quand même ce n'est pas ce qu'il dit vraiment...

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  2. bon allez encore un com' parce que j'ai trouvé ca :
    http://www.zonezerogene.com/magazine/mauvaise-humeur-le-feminisme-anti-putes-me-gave/11/02/2011/
    Avec un max de nunuches persuadées que la prostitution c'est archi cool.

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  3. @ Euterpe

    Désolée pour la réponse tardive mais j'ai eu des impératifs hier.

    Merci pour les deux liens. J'ai posté un commentaire sur le second. Je pense qu'il ne servira à rien tant ce genre de pseudo-féministe en carton est en général bornée à faire de la provoc suce-boules en se croyant branchée parce qu'elle a lu Despentes et Paglia et croit que trois gros mots suffisent à faire d'elle une femme libérée.

    Quant au premier, je n'ai pas eu le temps de poster mais n'hésite pas à me faire signe si tu es en galère ;)

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